Jacques Roulet a participé à l'épîsode Adret Corporation aux Etats Unis en 1975. Il nous raconte son aventure...
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Tout a démarré en 1975,
Un jour un Américain est venu chez ADRET, c’était si je me souviens bien durant l’été 1975, cet homme était ingénieur en électronique et s’appelait Miguel Champalanne, je crois me souvenir qu’il était d’origine Mexicaine, tout le monde se demandait chez ADRET qui était ce monsieur, il est resté environ trois mois au bureau d’étude et j’ai lié amitié avec lui, Miguel était passionné de voitures de course et moi aussi, déjà nous avions un point commun, à cet époque je faisais équipe avec un ingénieur dont le nom était Mr Marchais (je ne sais pas ce qu’il est devenu ?).
Mr Marchais et moi-même avions la charge de la mise au point d’un nouveau synthétiseur 60 Mhz avec une résolution de 1 Hz qui était le fils de feu le CS 202, je n’arrive plus à me souvenir de son nom, je crois que c’était le 3300, j’ai su bien après en discutant avec Miguel que cet appareil était étudié spécialement pour le marché Américain et qu’il était prévu de le fabriquer sur place c'est-à-dire sur le continent Américain, à l’époque c’était le seul moyen de s’implanter aux États Unis et je crois que cela n’a pas changé, le protectionnisme Américain est toujours d’actualité !!
Un jour Miguel est venu me voir et m’a pris à parti pour me demander si j’accepterais de venir aux États-Unis pour participer à la mise en route de la chaîne de fabrication de ce Synthétiseur, ce moment à été un des moments les plus importants de ma vie et restera indélébile jusqu’à la fin, je ne sais plus si j’ai dis oui tout de suite le choc était assez fort et je pense me souvenir que j’ai mis du temps à m’en remettre mais bien sur pour finir j’ai dit oui !!
J’avais 24 ans à l’époque et quand j’y pense, j’ai eu une chance incroyable ! Je suis parti en décembre 1974 dans un Boeing 747, le rêve continuait !!! je suis arrivé à Kennedy airport et je me souviens que j’ai failli louper ma correspondance parce que j’étais sorti de l’aéroport pour me persuader que j’étais bien aux États-Unis !! pour finir j’ai eu ma correspondance et ai fait un saut de puce jusqu’à Lancaster en Pennsylvanie ou étaient les bureaux d’ADRET Corporation, Miguel est venu me chercher à l’aéroport et m’a emmené à l’hôtel Hilton de Lancaster !!! ADRET avait fait les choses bien, le rêve continuait…. (pour anecdote, quand j’ai quitté l’hôtel j’ai gardé la clef en souvenir !!)
ADRET Corporation était une petite société, elle était composée de six personnes, Miguel, Josette Shuey qui était l’assistante de Miguel et qui faisait le lien avec la France car elle parlait très bien Français, il y avait aussi un commercial dont je ne me souvient plus le nom, je me rappelle qu’il venait me chercher à l’hôtel tous les jours et qu’il avait une coccinelle VW beige, il y avait également deux monteuses câbleuses Bonie, Barbara et moi-même.
La fabrication à commencée, bien entendu, tout n’était pas fabriqué sur place beaucoup de pièces venaient de Trappes et notamment les pilotes qui étaient le cœur du synthétiseur, l’esprit d’équipe était formidable, j’étais assez stressé mais je connaissais ce synthé sur le bout des doigts, le nombre de spires et le type de ferrite de chaque néosid , le châssis, la moindre vis, bien sur il y a eu des ratés mais le premier synthé ADRET made in U.S.A. a fini par parler et c’est aussi un souvenir inoubliable !! je ne me souviens plus combien de synthétiseurs sont sortis de la chaîne de fabrication d’ ADRET Corporation ??
Ce rêve a duré environ trois mois, mon contrat était assorti d’une période d’essais, malgré mon enthousiasme et le bonheur que j’avais de participer à une création j’avais le mal du pays, le mode de vie aux états Unie était tellement différente du notre à l’époque que pour finir je n’avais qu’une hâte, c’était de revenir retrouver ma famille et mes amis en France.
Pendant le voyage de retour en mars 1976 le rêve à continué, dans cet avion il y avait un homme que j’admirais beaucoup à l’époque (ce qui n’a plus été le cas après) c’était le Commandant Cousteau, malgré mon jeune age et ma timidité de l’époque, j’ai pris mon courage à deux mains et suis allé lui parler pour lui dire mon admiration et c’est à peine si il m’a répondu et en plus il avait un air hautain !! et la, le rêve s’est brisé..
En définitif ARET Corporation à été un fiasco commercial (je pense) cet épisode a du coûter beaucoup d’argent à la ADRET Électronique et n’a pas eu le résultat escompté en retour, je me suis souvent posé la question de savoir si j’avais participé à cet échec en refusant le contrat que m’avait proposé ADRET Corporation mais c’est sûrement me donner trop d’importance on aurait trouvé quelqu’un d’autre, la Direction d’ADRET ne m’a jamais donné d’explications sur cet échec et j’ai été licencié pour causes économiques en juin 1976.
En attachement, j’ai mis quelques documents que j’ai pu retrouver.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Liberty_Bell
Voila , j’espère avoir pu vous faire comprendre un peu cet épisode, la manière dont-il s’est terminé reste toujours une énigme pour moi ?
Jacques Roulet.
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Quelques anecdotes de Jacques Roulet...
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Je vous ai mis en annexe une photo d’une platine sur laquelle j’ai une anecdote très personnelle, un jour ce devait être en 1974, Mr Charbonnier sort de son bureau comme si il avait eu une révélation et il dit avec sa voix qui était assez forte : Mr Roulet prenez votre cahier et venez dans mon bureau ! Je dois dire que j’ai eu un pincement au cœur, je suis rentré dans son bureau un peu tremblant, je m’asseye et Mr Charbonnier me dit prenez des notes et il commence a dessiner un schéma sur le tableau noir qui était dans son bureau, j’étais ébahis, il dessinait comme nous, nous écrivons une lettre, en même temps qu’il dessinait il mettait la valeur de tous les composants, j’avais l’impression de vivre un moment magique ! Une fois terminé, il m’a chargé de rendre ce schéma vivant, quand j’ai eu fini de réaliser la platine Mr Charbonnier est venu s’asseoir à mon poste de travail, nous avons mis en route cette platine et c’est incroyable, elle a fonctionné pratiquement du premier coup mis à part quelques valeurs de condensateurs et de nombre de spires dans certains néosids, une fois terminé, Mr Charbonnier s’est levé, m’a regardé et m’a dit « félicitation c’est du beau travail » je ne savais plus ou me mettre, ce compliment venant de cet homme m’a beaucoup marqué, ce moment m’a accompagné toute ma vie et à chaque fois que j’y pense c’est avec beaucoup d’émotion ! Voila mon anecdote.
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J’ai une autre anecdote, et c’est votre message qui m’y a fait penser, un jour, c’était un lundi j’en suis sur mais l’année je ne m’en souvient plus, Roger Charbonnier est arrivé au bureau d’étude avec un paquet et dans ce paquet il y avait une voiture télécommandée qu’il avait fabriqué sans doute pendant le w.end, il l’a posée sur le sol du couloir qui bordait les bureaux et il a actionné une petite boîte qu’il tenait dans ses mains, cette voiture avait des accélérations foudroyantes à arracher la moquette du couloir et je regardais Mr Charbonnier, il avait un visage d’enfant ! Je pense que toute sa vie il est resté enfant dans sa tête, c’était un enfant génial !
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Quelques tranches de vie de l'époque d'Adret.....
1er anecdote (toutes ces anecdotes n’ont rien de technique elles reflètent juste un peu de l’atmosphère d’ADRET à l’époque)
En 1970 à l’époque ou j’ai été embauché chez ADRET je venais au travail à moto, j’avais une Triumph 650 Thunderbird qui faisait un bruit d’enfer, on m’entendait arriver à trois kilomètres à la ronde !, un jour comme d’habitude je suis arrivé sur le parking et ai garé ma moto toujours au même endroit pas loin des escaliers qui menaient aux bureaux, en haut des escaliers ce jour il y avait Mr Charbonnier qui discutait avec Mr et Mme Arouzé qui étaient les gardiens des locaux et qui vivaient la, Mr Charbonnier a descendu les marches, est venu vers moi, à regardé ma moto avec un air intéressé, m’a regardé avec un sourire et m’a dit : « alors c’est vous la terreur de Trappes » je ne sais plus ce que je lui ai répondu mais sans doute une banalité, c’est la que je me suis rendu compte que Mr Charbonnier était un homme profondément humain et sans aucune prétention.
2ème anecdote (mais je me demande si je ne vous l’ai pas déjà raconté ?)
Toujours en 1970, à l’époque j’étais technicien de plateforme sous la direction de Mr Temperville (je ne sais pas ce qu’il est devenu) j’étais ami avec Michel André un technicien qui travaillait avec moi et pendant les pauses on faisait quelque fois des bêtises, un jour on s’était amusés à placer dans les couloirs des condensateurs que l’on avait chargé avec le banc de claquage que l’on utilisait pour contrôler l’isolement des synthétiseurs et on guettait les malheureux qui ramassaient ces condensateurs et je dois dire que c’était très amusant ! mais un jour c’est Jean Claude Lévêque qui à pris une décharge ! quand on a vu ça on a ri un peu jaune et on est retourné à notre poste de travail, peu de temps après mon ami et moi avons été convoqués dans le bureau de Jean Claude Lévêque et bien sur on a compris… Jean Claude Lévêque ne nous a fait aucune remontrance, mais nous a fait un cours magistral de technologie sur les condensateurs mica et nous a fait comprendre que c’était très mauvais pour ces pauvres condensateurs de les charger avec des tensions aussi fortes ! et on reparti un peu penaud !
3ème anecdote
Comme je vous l’ai dit, j’étais passionné de sports mécaniques et c’est encore en 1970, j’avais racheté la Dauphine de mon ami Michel André et cette voiture j’ai entrepris de la transformer, j’ai acheté un kit « sport » avec arbre came spécial, culasse, carburation et échappement modifié, c’est devenu une vraie fusée, et je ne sais pas si vous vous souvenez mais la Dauphine était réputée pour ne pas tenir la route, mais j’étais sur de moi, j’avais modifié les suspensions et mis des élargisseurs de voies !
Une fois terminé, je suis arrivé au bureau tout fier de ma réalisation et pendant la pause de midi, j’étais avec Michel André et Dominique Watrin qui était aussi passionné de voiture et je ne sais plus pourquoi mais on en est arrivé à faire le paris stupide de prendre le virage (qui était à angle droit) juste avant l’entrée du parking d’ADRET à fond de troisième et en dérapage « contrôlé » j’étais sur de moi, j’ai pris mon élan sur la ligne droite pendant 300 mètres avant le fameux virage, en abordant le virage j’étais très confiant j’ai braqué pensant que la voiture se mettrait en dérive et que j'allais contrôler tout ça! et bien pas du tout, elle s’est soulevée de l’arrière, j’ai fait deux tonneaux et ai terminé ma course dans les grilles du parking que j’ai un peu défoncée !! je suis sorti de la voiture avec quelques bleus et une mine de cachet d’aspirine en relevant la tête, j’ai vu que presque toutes les fenêtres de l’usine étaient ouvertes et que tout le personnel présent à cette heure regardait dans ma direction, je ne savait plus ou me mettre ! on m’a dit que cet accident avait fait tellement de bruit (la gare n’étant pas très loin), ils avaient cru qu’un train avait déraillé !
Voila mes anecdotes, tout cela n’est pas très sérieux mais il y a prescription, on était jeunes et il faut bien que jeunesse se passe…...
A bientôt,
Jacques Roulet.
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